Faire trop d’excès est-il si mauvais ? Pourquoi l’excès ? Que cherche t-on à résoudre dans l’excès ? Je me pose ces questions car en relisant une biographie de Charlie Parker, je me dis qu’heureusement qu’il soit devenu complètement accro à l’héroïne car il n’aurait jamais enregistré le live mythique au Blue Note. Mais on n’a pas le droit de dire cela…
Mais d’où vient l’excès ?
L’excès est finalement la résultante de la transgression ou cette envie incontrôlable d’aller à contre courant. Nous avons tous dans notre entourage une personne qui ne suit pas les règles. Elle ne le fait pas forcément exprès d’ailleurs !
Retrouvez l’excès dans ce podcast de radio france.
Les premiers “excessifs” voyaient dans la morale religieuse, le terrain idéal pour provoquer avec outrance. Georges Bataille transgresseur en chef déclare “une maison close est ma véritable église” dans Le coupable. Le décor est planté et se délectera de la tête des idoles de la morale qui lisent ces ouvrages.
Lorsque l’église n’est plus la cible, c’est la société patriarcale qui prend cher. Franchement, une organisation sociale est un terrain de jeu idéal pour tout contester avec excès. L’après guerre accentuera encore plus le mouvement car après avoir subi, il est temps de libérer la folie qui est en nous. “Carpe diem” remet Horace sous la lumière : la vie est courte et il faut se hâter d’en profiter.
Profiter, c’est la raison de l’excès. faire trop d’excès.
C’est le profit qui légitime l’action d’aller au bout de l’expérience et comme dans toutes les courses, c’est le plus résistant qui ira le plus loin ou le plus vite. Car il y a deux formes d’excès. Celui qu’on installe dans un quotidien, une habitude et celui que l’on fait comme un feu de St Jean, grand, fort, puissant mais éphémère. Tiens d’ailleurs, est-ce que l’excès ne commence pas par changer ses habitudes ?
L’excès installé est d’une tristesse absolu, il vous transforme en bourgeois d’une addiction calculée prévue et médiocre. Vous devenez fumeur toussoteux, buveur de whisky à l’apéro, dragueur à l’haleine de porc. Ce n’est pas le vrai excès, c’est de la bêtise.
Non, le vrai excès est un feu, un changement de direction, une vraie connerie. C’est une sorte de dysfonctionnement imprévisible. J’image que cela ressemble à un contre courant électrique dans le cerveau qui change un aiguillage neuronal… C’est totalement incontrôlable. C’est beau.
Faire trop d’excès devient une posture.
On y arrive…
Le problème de l’excès c’est qu’il génère aussi de belles choses. J’ai beau chercher dans tous les sens mais c’est incroyable le nombre d’erreur, de pétage de plomb, de crise, de liberté absolu qui ont été faits par excès et qui ont généré des choses sublimes.
On imagine que nos pensées suffisent à satisfaire nos désirs, on pense que nos corps obéissent à nos ordres, on pense que les sons ne font que traverser l’air… On se trompe. Nos pensées veulent activer nos corps, nos corps veulent leur autonomie, les sons veulent relier notre coeur à notre esprit et c’est exactement ce qui se passe lorsqu’on est excessif… Et c’est certainement pour cela qu’on va le chercher.
Faire trop d’excès génère donc des souvenirs inoubliables, des chefs d’oeuvres.
Prenez une salle de concert habillé de bourgeois assoupis qui se gaussent d’une symphonie de Mozart. Ils sont juste à un concert punk car Amadeus, faut-il le rappeler, n’était pas du genre propre sur lui.
Flânez dans le musée Van Gogh d’Amsterdam dans le silence des parquets feutrés. Le garçon avait des crises à faire voltiger des couteaux !
Écoutez ce disque de Charlie Parker au Blue Note de New-York, vous allez vous transposer dans le pur club de jazz le plus mythique de tous les temps, vous sentirez même la vapeur des années 50 suintée des enceintes… Eh bien si vous vous injectez ce qu’il s’injectait dans les veines, ce sont les anges qu’il faudra faire swinguer….
Qu’ils soit nourrissant comme l’art ou la culture ou terrifiant comme les pires vices de l”humanité, l’excès est aussi à l’origine de souvenirs inoubliables.
(si cela vous arrive, n’oubliez pas de les sauvegarder ! )
P&P
Photo de couverture : Zach GALIFIANAKIS (Alan), Grant HOLMQUIST (Tyler), Bradley COOPER (Phil), Ed HELMS (Stu), Réalisation: Todd PHILLIPS
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